Ils fouillaient les ruines carbonisées de maisons où ils ne seraient pas entrés avant. Un cadavre flottant dans l’eau noire d’une cave entre les détritus et les canalisations rouillées. Il était dans une salle de séjour en partie incendiée et à ciel ouvert. Les planches déformées par l’eau tombaient de guingois dans la cour. Des volumes spongieux dans une bibliothèque. Il en prit un et l’ouvrit puis le remit en place. Tout était humide. En train de pourrir. Il trouva une bougie dans un tiroir. Pas moyen de l’allumer. Il la mit dans sa poche. Il sortit dans la lumière grise et s’arrêta et il vit l’espace d’un bref instant l’absolue vérité du monde. Le froid tournoyant sans répit autour de la terre intestat. L’implacable obscurité. Les chiens aveugles du soleil dans leur course. L’accablant vide noir de l’univers. Et quelque part deux animaux traqués tremblant comme des renards dans leur refuge. Du temps en sursis et un monde en sursis et des yeux en sursis pour le pleurer.
— Cormac McCarthy, la Route (trad. Francois Hirsch)