Vous vous demandez peut-être où je mets l’intrigue, dans tout ça. La réponse – la mienne, en tout cas – est : nulle part. Je n’essaierai pas de vous convaincre que je n’ai jamais bâti d’intrigue, pas plus que je n’essaierai de vous convaincre que je n’ai jamais menti, mais j’évite le plus possible de faire l’un comme l’autre. Je me méfie des intrigues pour deux raisons : d’abord parce que nos vies en sont essentiellement dépourvues, en dépit de toutes les précautions raisonnables que nous pouvons prendre, de la minutie avec laquelle nous dressons nos plans ; ensuite parce que je considère qu’il y a incompatibilité entre la construction d’une intrigue et la spontanéité de la véritable création. C’est un point sur lequel je dois être clair : je désire que vous compreniez que ma conviction la plus profonde, quant à l’invention des histoires, est qu’elles se fabriquent en grande partie d’elles-mêmes. Le boulot de l’écrivain consiste à leur donner un lieu où s’épanouir (et à les transcrire, bien entendu).
— Stephen King, Écriture. Mémoires d’un métier (trad. William Olivier Desmond)