S’il est un mérite aux vacances, c’est de détacher les hommes de la fascination de l’actualité, du déversoir ininterrompu des informations, de l’Histoire, des luttes politiques ou syndicales. Ils aperçoivent alors, derrière le voile des événements, la vie pure et simple. À la vérité, cette expérience est battue en brèche, aujourd’hui, par l’omniprésence, même dans le désert saharien, des radios ou d’internet : le sens de l’Histoire et l’abject commérage mondial résonnent alors, la nuit, entre les dunes de sable, sous le ciel étoilé jadis pur et immémorial. Je ne cherchais rien d’autre que le silence, l’absence, le vide. Fuir loin de la tyrannie de la face humaine, comme l’écrivait Baudelaire. […] Sur ce point, je m’accordais avec Rousseau : la comédie sociale me répugnait. Une vie idéale, à mes yeux, devait se préserver de l’entassement en société, des soirées mondaines, du travail, et promouvoir, à l’inverse, le repli, la paresse, la quiétude et un choix d’amis s’accordant à nos mélancolies, à nos plaisirs, à nos saucisses grillées et persillées.
— Patrice Jean, l’Homme surnuméraire