Quant à la situation du correcteur, les lignes suivantes, que nous écrivions au mois de décembre 1866, dans le journal l’Imprimerie, n’ont pas cessé d’être vraies : « Le correcteur, par son caractère et la nature de ses fonctions, est isolé, timide, sans rapports avec ses confrères, supporté plutôt qu’admis dans l’atelier typographique. Le patron voit souvent en lui une non-valeur, puisque son salaire est prélevé sur les étoffes ; le prote, la plupart du temps, diminue le plus possible l’importance de ses fonctions. Aussi, et nous avons le regret de le dire, le réduit le plus obscur et le plus malsain de l’atelier est d’ordinaire l’asile où on le confine. C’est là que, pendant de longues heures, il se livre silencieusement à la recherche des coquilles, heureux quand il n’est pas troublé dans sa tâche ingrate par les exigences incroyables de ceux qui exécutent ou dirigent le travail. Et pourtant, qu’est-ce que le correcteur ? D’ordinaire un déclassé, un transfuge de l’Université ou du séminaire, une épave de la littérature ou du journalisme, et que les circonstances ont fait moitié homme de lettres, moitié ouvrier. Aujourd’hui, sans doute, les choses ne sont plus ce qu’elles étaient il y a dix ans. Un élément jeune, plus énergique, est venu s’adjoindre aux hommes timides. »
— Eugène Boutmy, Dictionnaire de l’argot des typographes, 1883 (via Hélène Frédérick).