Ma caissière ne dit plus jamais merci, alors que je la remercie toujours quand elle me rend la monnaie. Ceci peut sembler anodin, mais c’est en fait un tournant majeur dans une guerre latente (déclarée par moi). Ces derniers temps, j’essaye de retenir mon merci en guise de revendication ou de protestation ; une contre-offensive, pour ainsi dire. Mais je n’y arrive pas. Parfois même, je me sens vaguement coupable, comme si j’achetais les mauvais produits, ou bien dans des quantités insuffisantes. Une fois, j’ai haussé les épaules, comme pour dire : « Qu’est-ce que j’y peux ? » Remarquez, je n’ai pas besoin d’un merci de la caissière. Mais je pense qu’il serait courtois et normal de la part de la direction de l’encourager dans ce sens, ce serait une reconnaissance formelle de mon statut de client. Je ne sais pas pourquoi, mais l’idée que ma clientèle puisse n’avoir aucune importance me bouleverse.
— Kenneth Bernard, Extraits des archives du district (trad. Sholby)