L’absolu littéraire dont je parle n’est rien d’autre que cet étrange espace sous-marin que creuse en nous la fréquentation de ces œuvres-marées qui nous donnent soudain le sentiment d’exister de façon totale, comme si ce sentiment tenait paradoxalement dans le fait de pouvoir s’abolir afin de n’être plus que l’écho de la voix d’un autre. Ce qui s’appelle lire. N’être rien d’autre que cette chambre d’écho où résonne une voix nous parlant d’un monde que l’on accueille enfin comme le sien. Nos contacts quotidiens avec les autres, si riches et agréables soient-ils, ont souvent peu à voir avec cette qualité de présence – ou d’absence.

— Frédérique Bernier, Hantises. Carnet de Frida Burns sur quelques morceaux de vie et de littérature