Au centre du ravin, sous la crête, les pelleteuses, les camions de huit tonnes comblaient ensuite avec le matériau qu’ils transportaient le lit de la route ainsi creusée, tandis qu’au-delà d’autres machines le faisaient progresser. Creuser puis combler, creuser puis combler. Pendant tout l’après-midi le travail se poursuivit. L’objectif visé était une autoroute moderne à grande vitesse, avec des pentes toutes inférieures à huit pour cent, pour le plus grand bénéfice des transporteurs routiers. Tel était au moins le but immédiat. L’idéal était plus lointain : le rêve des ingénieurs est une sphère parfaite. Une planète Terre aux irrégularités tout effacées, des autoroutes simplement peintes sur une surface lisse comme du verre.
— Edward Abbey, le Gang de la clef à molette (trad. Pierre Guillaumin)