Cela se passait de nuit, vers 23 heures, précise le commandant de M., sur une mer d’huile et sous un ciel somptueusement étoilé. À chaque tir — ou à chaque impulsion — du canon émetteur d’ondes électroacoustiques, poursuit le commandant, une infinité de points lumineux, comme une réflexion de ceux dont le ciel était criblé, s’allumaient dans les profondeurs sous-marines, pour s’éteindre au bout de quelques secondes, puis se rallumer après une nouvelle giclée d’ondes. Et pendant ce laps de temps, conclut le commandant, où scintillaient dans les profondeurs les millions de micro-organismes stimulés mystérieusement par les ondes, tandis que brillaient au ciel les étoiles, c’était exactement comme si le bateau, libéré de tout lien terrestre, voguait en apesanteur dans l’espace.

— Jean Rolin, Ormuz