Pourtant, il était insatisfait. Quelque chose en lui réclamait, un besoin nouveau, impérieux, qui n’était rien de moins que le besoin de passer à travers les murs. Sans doute le pouvait-il faire aisément, par exemple chez lui, et du reste, il n’y manqua pas. Mais l’homme qui possède des dons brillants ne peut se satisfaire longtemps de les exercer sur un objet médiocre. Passer à travers les murs ne saurait d’ailleurs constituer une fin en soi. C’est le départ d’une aventure, qui appelle une suite, un développement et, en somme, une rétribution. Dutilleul le comprit très bien. Il sentait en lui un besoin d’expansion, un désir croissant de s’accomplir et de se surpasser, et une certaine nostalgie qui était quelque chose comme l’appel de derrière le mur. Malheureusement, il lui manquait un but.

— Marcel Aymé, le Passe-muraille